Le traite négrière, organisée par les États d’Europe occidentale a fait l’objet d’une législation minutieuse (fiscalité, commerce, administration, sanitaire).
Les archives publiques et privées abondent et ont permis aux historiens d’analyser avec rigueur les mécanismes mis en œuvre par les armateurs, les capitaines des navires, les fournisseurs des marchandises destinées à l’achat des captifs sur les côtes d’Afrique, les planteurs des colonies acheteurs de cette main-d’œuvre servile, les administrateurs chargés de la gestion et de la défense des colonies etc.
Il est admis que la traite négrière a prélevé en Afrique environ 15 millions d’êtres humains (toutes destinations confondues) dont un tiers de femmes.
La mortalité au cours de la traversée a été très inégale selon les périodes et les expéditions, mais le nombre de morts au cours des transatlantiques (soigneusement consignés sur les registres de bord) s’est élevée à environ 15 % du total des captifs embarqués – soit environ 2 millions de disparus en mer.
L’historien Joseph Ki-Zerbo estime que pour chaque Africain vendu en Amérique, 4 autres étaient morts entre le moment de la rafle et le débarquement.
Le Portugal a effectué le transfert aux Amériques de plus de 4,6 millions d’esclaves. Ayant inauguré la traite négrière dès le milieu du XVIe siècle, il a en outre assumé l’essentiel de la traite illégale au XIXe siècle.
L’origine des Africains
Au XVIe siècle, les esclaves provenaient de royautés tribales africaines issues de Sénégambie et des régions du golfe de Guinée. (Ce qui n’est évidemment pas sans rapport avec les implantations portugaises de São Tomé et du Cap Vert.)
Les premiers esclaves victimes de la traite négrière étaient donc principalement Wolofs, Peuls, Mandingues, Sérères, Mossis, Yorubas et Haoussas. Rapidement, les Bantous, à la faveur de la conquête de l’Angola par les Portugais en 1575, s’agrégèrent à la liste des peuples déportés.
C’est à Bartolomé Bennassar que nous devons le résumé le plus synthétique du drame de l’esclavage au Brésil qui se jouait dans les bateaux européens
« Ces hommes et ces femmes, d’abord privés de liberté, transformés en marchandises, condamnés à un voyage atroce, confinés dans des cales puantes, se trouvaient projetés dans un univers dont ils ignoraient tout. A peine rétablis des souffrances de la traversée, aliénés à un maître inconnu, privés de leur environnement géographique, tribal, familial, affectif, affligés d’isolement linguistique, soumis à un labeur exténuant, qu’il s’agisse des travaux de la plantation ou de ceux du moulin, à des régimes alimentaires nouveaux, ils étaient absolument, des déracinés. »
Il faut néanmoins nuancer le tableau tragique de l’isolement dont fait l’objet l’esclave africain chez de nombreux auteurs. En effet, comme on l’a suggéré, les contingents d’Africains aux premières heures de l’esclavage au Brésil étaient des groupes ethniques possédant des caractéristiques culturelles communes, bien qu’usant de langues différentes.
Toutefois, ils passaient ensuite plusieurs mois parqués sur la côte avant l’arrivée des négriers. Un temps au cours duquel ils pouvaient commencer à apprendre la langue des autres ou à développer un embryon de langue commune afin de partager leurs histoires et, probablement, élaborer des stratégies de survie et de résistance.
La langue, c’est l’institution symbolique par excellence, la première pierre angulaire de la culture.
Ce qu’ils avaient construit en Afrique durant leur captivité survivait généralement à la traversée de l’Océan. Le chargement des négriers s’effectuait en effet dans un nombre limité de ports. Des groupes de fortune se sont ainsi formés avant même leurs arrivées au Brésil.