L’histoire de la Seleção, la célèbre équipe nationale de football du Brésil, commence en 1914. Contrairement aux idées reçues, ses débuts n’ont pas été des plus glorieux…
La fondation de l’équipe nationale brésilienne coïncide en effet avec les débuts de la professionnalisation de ce sport au Brésil, ce qui a eu des effets désastreux dans la cohésion des premières équipes : les joueurs semblaient davantage occupés à briller personnellement qu’à passer la balle à leurs coéquipiers ! Le Brésil s’est ainsi fait éliminer au premier tour des Coupes du Monde 1930 et 1934, ce qui reste à ce jour la plus mauvaise performance de l’équipe nationale.
Le Brésil reste cependant le seul pays dont l’équipe nationale de football a participé à toutes les phases finales de la Coupe du Monde (20/20 en comptant la Coupe du Monde 2014). C’est également la seule équipe à avoir 5 étoiles gravées sur son maillot, représentant ses 5 victoires (1958, 1962, 1970, 1994, 2002).
Aujourd’hui, le Brésil est la référence mondiale du ballon rond, « le pays du football ». Au même titre que la plage de Copacabana, la Bossa Nova ou bien le Carnaval, le football fait partie intégrante de l’identité brésilienne. C’est même devenu un très bon produit d’exportation.
Aucun sport n’a autant été approprié par un peuple que le football par les Brésiliens. L’histoire de la Seleção est un patrimoine national. Ici c’est bien plus qu’un sport, c’est devenu une véritable Institution. Revêtir un jour la tenue auriverde reste le rêve de tous les gamins jouant aux quatre coins des rues…
C’est en effet une véritable fierté que de porter le maillot de la Seleção, et autant dire que ce n’est pas ici que l’on pourrait voir éclore une polémique sur qui chante ou non l’hymne national… Ici c’est tout le monde en chœur! « Todos Um !«
Un style à part entière
L’une des spécificités du jeu à la brésilienne est sans aucun doute ce jeu spectaculaire « football samba », toujours porté vers l’attaque et où le « brincar » (la chambre) est roi. Il s’agit en somme de garder la balle et faire étalage de son bagage technique en écœurant un adversaire assailli par les quolibets des spectateurs… Et il faut bien avouer qu’il n’y a pas de meilleure école pour apprendre les insultes brésiliennes que les tribunes d’un stade.
C’est une tradition ancienne, décrite à merveille dès 1938 par le sociologue Gilberto Freyre :
« Notre style paraît contraster avec ceux des Européens par une conjonction de qualités, de surprise, de ruse, d’astuce, de légèreté et en même temps de spontanéité individuelle. Nos passes, nos dribbles, nos tromperies, nos fioritures avec le ballon ont quelque chose de la danse ou de la capoeira qui arrondissent et adoucissent le jeu inventé par les Anglais.
Pour résumer, les Anglais ont inventé le football, les Brésiliens en ont fait un art ! »
Garrincha dont le surnom est « la joie du peuple » reste à jamais le précurseur de ce style chaloupé devenu aujourd’hui la marque de fabrique du pays. Tout comme Ronaldinho ou Neymar, les actuels architectes de l’histoire de la Seleção, il incarne le meilleur dribbleur de sa génération. C’est un « malandro » (voyou) combinant talent, insouciance et allégresse ; le cocktail préféré des Brésiliens.
Ces cracks du ballon rond sont les symboles de la profusion de talents des footballeurs brésiliens, et c’est bien sûr cet aspect bad boy qui séduit le plus les observateurs étrangers.
Leônidas, Didi, Nilson Santos, Tostão, Pelé, Carlos Alberto, Rivelino, Zico, Socrates, Romario, Ronaldo… nombreux sont les légendes brésiliennes à avoir marqué de leur empreintes l’histoire de la Seleção et plus encore.
Mais pour qui a le privilège de porter la tenue auriverde, la pression est constante ! Il faut mouiller le maillot, se sublimer, tout donner pour faire vibrer le peuple. En somme, porter le maillot de l’équipe nationale, c’est rien de moins qu’accepter de se transformer en super héros pendant 90 minutes.
Car au Brésil, le football rime avec spectacle. Bien loin des fins tacticiens italiens, ici, on privilégie l’instinct offensif, et tout ce qui peut mettre en valeur les qualités techniques du joueur… Ici, la victoire n’a de saveur qu’accompagnée de la manière. Sans quoi, c’est « ciao ciao Dunga et Menezes s’en souviennent encore.Andre Maurois résume parfaitement le style de la Seleção le lendemain de la demi-finale de 1950 après une victoire du Brésil 7 à 1 contre la Suède :
« Jamais, je ne vis, dans ma vie, une équipe jouer de cette manière. Les Brésiliens pratiquent un football merveilleux. Plein de virtuosité, vrais artistes du terrain, sans perdre, cependant, l’esprit et l’objectivité. C’est un éblouissement. »
La formule n’a quasiment pas changé plus de 60 ans après, et l’on souhaite un meilleur final à cette talentueuse équipe ; il est temps de chasser le spectre de la finale perdue à domicile en 1950 et de finir cette Coupe en apothéose !
Avec le retour de Luis Felipe Scolari (vainqueur en 2002) associé à Carlos Alberto Pareira (vainqueur en 1994), on a privilégié l’expérience des grands rendez-vous afin d’encadrer l’insouciance et le talent des Neymar, Oscar et autres. On redonne les rennes de l’équipe nationale à ceux qui ont su l’emmener jusqu’au sommet afin qu’ils puissent redorer son blason et ainsi devenir la première équipe à décrocher les 6 étoiles. Reste à savoir si la sauce va prendre…
Le slogan de la Seleção 2014, « A Copa é Nossa » (La Coupe est à nous !) résume d’un trait les ambitions du pays : le scénario est écrit d’avance. Mais l’histoire de la Seleção 2014 reste encore à écrire.