Luiz Inacio Lula da Silva est né le 27 octobre 1945 à Caetes, une petite bourgade aride du district de Garanhuns dans l’État de Pernambouc (région Nordeste). Il est le dernier des 8 enfants d’une très modeste famille qui survivait difficilement des travaux agricoles du père, Arisitide Inacio Da Silva.
Le Pernambouc est l’Etat brésilien le plus anciennement colonisé (Olinda fut la première capitale du Brésil colonial). Comme au temps de l’esclavage, les 80 millions d’hectares de terres arables de ce petit État brésilien sont monopolisées par une vingtaine de familles. Ces grands propriétaires latifundiaires descendent en droites lignes des anciens clans féodaux et esclavagistes .
La monoculture de la canne à sucre structure encore le paysage agricole au point de compromettre gravement l’agriculture vivrière de la région : malgré la richesse de sa terre, le Pernambouc importe toujours en grande partie ses denrées alimentaires.
Jusqu’à l’élection de Lula, la mortalité infantile dans le Pernambouc était une des plus élevée au monde, comparable à celle de Haïti.
Le père de Lula était ce qu’on appelle encore aujourd’hui un boia frio (bœuf-froid), surnom donné aux travailleurs agricoles. Chaque matin, il quittait sa cabane familiale pour rejoindre le bourg du village emportant avec lui sa gamelle composée de riz, de haricots et de patates préparée par sa femme. Puis, en compagnie d’autres travailleurs sans terres, il attendait le bon vouloir du feitor (contremaître) chargé de dispatcher les journaliers sur les propriétés des latifundiaires pour des périodes très aléatoires.
Ils travaillaient alors comme des bœufs (boia) et, quoiqu’il arrive, mangeaient toujours froid (frio).
En 1950, alors que Lula n’avait que 5 ans, son père, désespéré par cette vie de misère, parti seul tenter sa chance comme manœuvre au port de Santos (Etat de São Paulo).
Deux ans plus tard, les hommes de main d’un grand propriétaire terrien forcèrent la mère de Lula (dona Lindu) à céder son petit lopin de terre pour une somme avoisinant 50 euros d’aujourd’hui…
La famille de Lula prit alors le chemin de l’exode vers le Sud du pays, celui si bien raconté par l’écrivain Jorge Amado dans Les chemins de la faim.
Dans les années 1950, le voyage du Nordeste vers São Paulo était une odyssée d’environ deux semaines. On appelait cette masse de migrants les pau de Ara (griffes de perroquet) puisqu’il s’agissait pour ces misérables de s’accrocher avec leurs ongles aux sacs de sucre raffiné ou autres bois tropicaux transportés par des véhicules.
Au bout de 13 jours de voyage, la famille de Lula arriva dans les bas-quartiers de Santos. Lula et son frère aîné se mirent immédiatement à la recherche de leur père. Ils le retrouvèrent… Mais avec une autre femme et deux autres enfants. Il n’aura plus jamais de contact avec lui.
En 1956, sa famille déménage dans un minuscule deux pièces derrière un bar. Ils partagent les toilettes avec les clients du bar. Bien que sa mère travaille jour et nuit comme couturière, ce n’est pas assez pour sortir de la misère. Ses deux sœurs meurent d’infections liées à la malnutrition.
Luiz Inacio Lula da Silva commença à travailler dès l’âge de 12 ans, d’abord dans une teinturerie puis comme garçon de course pour un bureau du centre-ville de São Paulo. A 14 ans, un ami lui offrit son premier billet de cinéma : il fut refoulé dès l’entrée, à cause de sa tenue vestimentaire.
Puis les choses changèrent : la même année, Luiz Inacio Lula da Silva décroche un contrat d’apprenti dans une usine métallurgique. Il y travaille 6 jours sur 7, 72 heures par semaine.
En 1964, lorsque la dictature s’installe, Luis Inacio Lula da Silva est un jeune ouvrier tourneur qui vient de perdre un doigt dans les engrenages d’une machine.
La dictature affecte de plein fouet les conditions de vie des plus précaires. Luiz Inacio Lula da Silva et ses camarades métallurgistes réagissent pacifiquement en organisant des grèves. Déjà, il s’impose naturellement comme un leader et la direction de son usine le sanctionne comme tel, en le privant de son salaire. Il sombre à nouveau dans une épouvantable misère… Sa première femme lui annonce alors qu’il sera bientôt papa.
Mais celle-ci contracte une infection à moins d’un mois de son terme. Aidé d’un ami, Lula la transporte en urgence l’hôpital. Le médecin exige un dépôt d’argent. Lui et ses camarades n’en ont guère.
Femme et bébé meurent dans un corridor de l’hôpital.
Dans les années suivantes, Luiz Inacio Lula da Silva s’affirme comme un leader syndical d’exception. Il structure des mouvements de grève général avec un certain succès. En 1980, il fonde le Parti des Travailleurs (PT) avec l’aide de son ami Frei Betto, un prêtre dominicain résistant à la dictature militaire et adepte de la théologie de la libération.
Plus qu’un parti politique traditionnel, le PT est un front de classe qui agrège tout un tas de structures progressistes (partis politiques, associations civiques, syndicats, fondations religieuses) à l’avant-garde des mouvements sociaux brésiliens.
Le 27 octobre 2002, Luiz Inacio Lula da Silva est élu président de la République fédérale du Brésil avec 62% des suffrages exprimés. Le bilan de son action est considérable.